Liam Silverstein Orwell ; présentation en cours.

J'ai chaud. J'ai trop chaud. J'en ai marre. J'ai juste envie de quitter la scène. De me casser d'ici, ouais. De laisser ce groupe tout seul, sans guitariste. De les abandonner comme on abandonne les personnes les plus nulles de la Terre. Mais je ne peux pas. Je suis obligé de rester jouer leurs chansons pourries, de les supporter chaque soir dans ce foutu bar...

J'avais treize ans. J'étais le gamin le plus heureux de la planète. J'avais reçu, à Noël, une guitare des plus classes du monde. J'étais trop content. Je la voulais depuis au moins deux ans. Mes parents s'étaient enfin décidés à m'en acheter une, han yeah ! Je pense que c'est à partir de là que commença ma vie. Parce que vous voyez, avant, j'étais un petit garçon banal, qui avait de bonnes notes à l'école, des amis sur qui compter et avec qui s'éclater, des filles à regarder à travers la serrure de la porte des vestiaires, une famille plutôt ordinaire... Bref, je suis certain que vous raconter les années précédant le Noël de mes treize ans serait un peu ennuyeux. Mais là, dès que j'eus cette guitare en main, j'étais certain que c'était elle qui allait faire ma vie. C'était une guitare folk rouge, rouge sang. Elle était trop belle. Je crânais au collège en me vantant parce que moi, j'étais un gosse de riches et moi, mes parents m'avaient offert une superbe guitare à Noël. Ils étaient tous jaloux. Quelques semaines après avoir eu ma guitare, je parvins à convaincre mes parents de m'inscrire à des cours. Ben... avoir une guitare, c'est bien beau, mais savoir l'utiliser aurait été magnifique. Mes parents ont seulement accepté de m'inscrire à des cours de guitare via le solfège. Moi je m'en foutais, du moment que je jouais de la guitare. Mon plus grand rêve, je m'en rappelle encore, c'était d'avoir un groupe génial de rock avec mes potes et de jouer dans des petites salles parce que je ne voulais pas être connu. Ça avait l'air trop nul.
Mais rapidement, je me suis rendu compte que mon rêve n'étais pas aussi super que ça. J'avais seize ans. J'avais un niveau assez élevé en guitare, je passais quasiment tout mon temps à jouer. Cela ennuyait d'ailleurs mes parents. Eux, ils voulaient que je finisse médecin ou archéologue. Moi, j'avais envie de faire de la musique rien que pour m'éclater. J'avais des notes moyennes, je restais sur mes acquis. Les profs ne se plaignaient pas de moi. Ils m'encourageaient tout le temps. Mais moi, j'en avais rien à faire de leurs encouragements. Ils auraient pu me virer du bahut, ça m'aurait presque arrangé. Mais non. Ils restaient sur leur position. Et un jour, Lorsque j'ai vu, sur le carreau du centre commercial, une affiche qui m'a intrigué, j'ai tout de suite voulu parler à mes parents. J'ai alors emporté l'affiche avec moi et le soir, au dîner, je la leur ai montrée.

THE BUSY BOY RECHERCHE GUITARISTE !
Suite au départ de notre ancien gratteur, nous en recherchons un nouveau !
Contactez-nous au 06-**-**-**-** si vous êtes intéressés.

Vous imaginez la réponse de mes parents quand je leur ai demandé si je pouvais contacter le groupe.
- Non, Liam Silverstein. Tu dois de concentrer sur tes études. A propos, nous avons reçu ton dernier bulletin de notes. C'est pas terrible-terrible, tu sais...
Ouais, je le savais, ça. Mais je m'en foutais. Je m'en foutais ! Je voulais faire de la musique, quoi ! Pas des sciences, pas du français, pas de la littérature, de la musique ! Mais ça, ils ne le comprenaient pas. Pour eux, c'était juste une méchante utopie qui allait me jouer des tours, plus tard. Et moi, j'avais envie de leur crier que peu importait le futur, c'était le présent qui comptait. Mais je préférais éviter de leur dire ça, si je voulais garder intacte ma chère et tendre guitare.
Deux semaines plus tard, j'avais trouvé LA solution : faire du piano. Les vieux adoraient le piano, n'est-ce pas ? Je me suis alors dit que si je pouvais les amadouer en leur jouant quelques mélodieux airs, ils me laisseraient tenter ma chance auprès des TBB. J'ai bien dit peut-être. Mes parents n'avaient pas l'air contre mon envie d'apprendre le piano. J'ai alors commencé, et ils m'en ont rapidement acheté un. Finalement, j'aimais bien le piano. C'était un instrument superbe, on pouvait faire de ces trucs avec ! J'en avais presque oublié la guitare, tiens. C'est d'ailleurs ce que mes parents me reprochèrent. Selon eux, ils m'avaient acheté une guitare, il y avait trois ans de cela, et à présent elle restait toujours dans sa sacoche ! Et du coup, j'étais un type nul et sans intérêt qui changeait d'avis comme de chemise. Et puis aussi, mes notes descendaient de plus en plus. Si cela continuait, j'allais redoubler ! Peu m'importait de redoubler. Mais comme ils commençaient sérieusement à me bassiner avec cette histoire de "tu lâches la guitare", je ne pus m'empêcher de leur riposter un petit :
- A propos, le groupe dont je vous ai parlé dernièrement recherche toujours un guitariste ! Jouer de la guitare, c'est ce que vous voulez que je fasse, non ? Alors laissez-moi les contacter, tiens !
Mais ils ne voulurent rien entendre. Toujours pas décidés à me laisser entrer dans un groupe. Décidément, plus le temps passait, et moins je les aimais, ces deux-là.